Matt Helders, batteur et photographe des Arctic Monkeys

C’est à Sheffield en 2002 que Matt Helders fonde, aux côtés de Alex Turner, Jamie Cook et Nick O’Maley, le groupe mythique les Arctic Monkeys. En tant que batteur, il a depuis, fait plusieurs fois le tour du monde avec le groupe, vendu des millions d'albums et collaboré avec d'autres musiciens célèbres, dont Iggy Pop et Josh Homme. C'est aussi un photographe très talentueux. Dans cet article, Matt Helders nous parle de son équipement Leica, de la façon dont il photographie et de la relation entre sa musique et ses photos. 

Mise à jour : Depuis notre premier entretien avec Matt Helders, l'une des images dont nous avions parlé est devenue l'énigmatique couverture de l'album 2022 des Arctic Monkeys, "The Car". Nous avons rencontré Matt et il nous en a dit plus sur l'image et son parcours jusqu'à la couverture de l'album.

MH : L'histoire derrière cette photo c’est que je venais d’acheter un nouvel objectif pour mon Leica M6. C’était un objectif 90mm f/2 Summicron-M et j'ai voulu l'essayer. À l'époque, je vivais à Los Angeles -  downtown et la fenêtre de ma chambre donnait sur ce parking sur le toit. Parfois il se passait quelque chose et parfois rien du tout. J'ai fini par prendre beaucoup de photos de ce toit. C'était bien avant de penser à l'album. J'ai envoyé la photo à Alex (Turner, chanteur), ainsi que d'autres clichés que j'avais pris, pour présenter le nouvel objectif. Rien à voir avec le groupe. Cela a eu un certain effet sur lui, il a pensé que la photo était importante d'une certaine manière et cela l'a accompagné tout au long de l'écriture du disque. L'idée d'une voiture est mentionnée dans quelques chansons. Donc, quand il était temps de nommer le disque et de choisir la pochette, cela a été logique. J'ai pris cette photo avec mon Leica M6, du Portra 400 et un 90mm f/2.8 Elmarit-M.

MPB : Merci de prendre le temps de discuter avec nous, Matt. Pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivé à la photographie ?

MH : La photographie est quelque chose qui m'a intéressé dès mon plus jeune âge, mais je suppose que je n'ai commencé à prendre régulièrement des photos qu'à l'âge de 16 ans environ - ce qui correspond curieusement, à peu près au moment où j'ai commencé à jouer de la batterie. Je pense que c'est surtout parce qu'à l'université - la version anglaise de l'université où l'on va à 16 ans pour quelques années - j'avais accès à la fois à des tambours et à des appareils photo, à une chambre noire, etc.

MPB : Essayez-vous de consacrer du temps uniquement à la photographie, ou êtes-vous plutôt un photographe docu ? Emportant partout votre appareil photo avec vous ?

MH : Cela dépend. En général, j'ai juste un appareil photo avec moi partout où je vais et je cherche des opportunités. Parfois, je ne prends pas une seule photo, d'autres fois, je fais un rouleau complet en un après-midi. Je suis très économe avec mes photos. Je ne prends généralement qu'une seule photo de chaque chose et je passe à autre chose, une idée que j'ai volée à Eggleston. Pour moi, cela fait partie de l'excitation, de récupérer un rouleau de film avec 36 idées différentes. Il y a d'autres fois où j'ai voulu photographier quelque chose en particulier ou organiser un tournage, mais j'ai eu moins de succès avec cette méthode.

MPB : Quel est l'aspect le plus frustrant du métier de photographe ?

MH : Probablement le fait que la Golden Hour ne dure qu'une heure !

MPB : Pourquoi préférez-vous travailler avec des Leica et des pellicules photo ?

MH : Je pense que je travaille plus rapidement avec la mise au point d'unappareil photo télémétrique. J'utilisais des reflex à l'école et je pense que je passais trop de temps à m'assurer que la mise au point était parfaite dans le viseur. Voir uniquement ce qui était mis au point était parfois un peu ennuyeux. Puis j'ai commencé à apprécier la taille et la commodité des télémètres. J'avais un Canon Canonet, que j'adorais - et cela m'a finalement conduit à aimer le Leica. J'ai également utilisé des Contax G2 pendant un certain temps, et ils ont toujours une place spéciale dans mon cœur.

MPB : Vous utilisez parfois un Sony A7 - est-ce pour des moments ou des situations spécifiques ?

MH : Je pense que j'ai essayé de faire fonctionner le numérique par simple commodité. Surtout quand je voyageais et que je ne voulais pas attendre d'être rentré chez moi pour développer ma pellicule. J'aimais bien le Sony A7 parceque j'avais des adaptateurs pour utiliser tous mes anciens objectifs photo vidéo. J'ai également essayé le Leica numérique sans écran - ironiquement, cela m'a fait utiliser davantage mon M6 ! J'ai réalisé que je passais plus de temps à penser aux ordinateurs et aux cartes mémoires lecteur de cartes qu'à la photographie. Je pense qu'il est important d'avoir les négatifs. C'est quelque chose qui, si on en prend soin, pourra toujours être vu, montré ou exposé. Je n'ai rien contre le numérique, mais je trouve que j'ai moins de soucis à me faire lorsque je photographie en argentique.

MPB : Vous êtes musicien et photographe. Comment ces deux rôles se complètent-ils ?

MH : Ce sont tous deux des moyens de création. Le fait d'être dans mon groupe est très collaboratif, alors que la photographie, c'est juste moi - ce que j'aime. Évidemment, il arrive que mes mondes se heurtent, d'une manière agréable. La musique, les tournées et le travail en studio sont autant d'occasions de photographier quelque chose ou quelqu'un d'intéressant. Je fais attention à ne pas prendre les mêmes vieilles photos des coulisses du studio. Mais il y a des moments, comme lorsque j'enregistrais avec Iggy, où j'étais en quelque sorte libre de photographier ce qui se passait autour de moi. Donc, en fait, quand je ne jouais pas de la batterie, je prenais des photos. Avec les Arctic Monkeys, je suis constamment avec un appareil photo.

MPB : Qu'aimeriez-vous explorer dans le futur ?

MH : J'ai certainement quelques idées pour des projets particuliers qui m'intéressent. Quelque chose de plus structuré et planifié. Il faut juste que j'y consacre du temps. Pour l'instant, je me contente de photographier les choses de tous les jours, en essayant de rendre le banal intéressant. Je viens d'acheter un objectif de 90 mm pour mon Leica afin de faire des expériences. Cela s’annonce intéressant.

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